Le besoin de reconnaissance
Je vous invite à découvrir la face cachée du besoin de reconnaissance, celle qui fait la différence vise à se reconnaitre parmi les autres. Je vous propose un petit exercice de rééquilibrage en fin d'article.
Le besoin de reconnaissance est pour certains une validation de l'existence, pour d'autres le moyen de sortir ou de se protéger de l'isolement ou encore le désir de regarder et accepter sa propre différence et accueillir celles des autres sereinement. Si la reconnaissance est un besoin alors elle est vitale à tout individu comme faisant partie d'un ensemble vivant.
QU'EST-CE QUE LE BESOIN DE RECONNAISSANCE ?
Les interactions sociales forment un ensemble dans lequel chacun et chacune se reconnaît unique parmi ses semblables. En utilisant le terme de reconnaissance on peut l'identifier ainsi « re-co-naissance » (re = autrement, co = ensemble, naissance = action de naitre) c'est-à-dire « naître autrement dans un ensemble » c'est-à-dire soi avec les autres. C'est dans ce sens que « cette impérieuse nécessité d'être reconnu, de revendiquer la reconnaissance de soi par autrui engage le sujet dans la reconnaissance corrélative de soi et de l'autre, à moins qu'il ne se fixe dans une incessante quête de reconnaissance unilatérale. » (René Kaës). Il y a dans le besoin de reconnaissance celle de l'autre et celle de soi, c'est donc à travers la reconnaissance de l'autre qu'il se reconnait et qu'il peut également reconnaitre celui-ci. Donc le besoin de reconnaissance se nourrit réciproquement à la fois avec l'autre et avec soi.
PEUT-ON VIVRE SANS LE BESOIN DE RECONNAISSANCE ?
Comme le cite R. Kaes si nous étions fixés à l'unilatéralité, c'est-à-dire la quête de la différence, alors nous risquerions de nous écarter, de nous isoler du reste du monde. La différence creuse l'isolement, le rejet de l'autre, et ne fait exister que soi. Nous vivons dans une circularité du regard et de la parole avec l'autre. Nous avons besoin de nous retrouver dans une forme d'appartenance existentielle qui se traduit par le besoin de reconnaissance et d'acceptation réciproque de nos différences. Le besoin de reconnaissance va se faire par soi-même et/ou avec l'autre selon le cas et le caractère attribué à l'équilibre narcissique de la personne. Par conséquent la reconnaissance est l'acceptation de son unilatéralité, de sa propre différence, parmi ses semblables et l'acceptation de l'autre avec la sienne propre. Ça veut donc dire que tout sujet a besoin de rencontrer l'autre pour s'en différencier, apprendre à accepter l'unilatéralité, et faire reconnaitre la sienne.
NAISSANCES ET PROLONGEMENT DE NOS BESOINS
La reconnaissance de l'enfant va être construite sur la prise en compte de ses besoins primaires, puis de sa sécurité, le développement de son estime de lui-même, et son appartenance familiale et sociale, qui vont le conduire vers ses motivations personnelles à se réaliser et prendre sa place.
Pour en comprendre le processus il est important de se rappeler que depuis sa naissance l'enfant est pris en charge par des personnes qui subviennent à ses besoins. Qu'elles soient parentes, familles d'accueil, ou institution, la responsabilité de chacune d'entre elles est de donner les soins nécessaires au développement de l'enfant : préserver sa santé physique et psychologique, sa sécurité, son éducation, son appartenance à la société, afin qu'il puisse se réaliser en tant qu'individu et sujet unique. En 1989, la « Convention internationale des droits de l'enfant » définit l'engagement de chacun, des institutions et des pays, à répondre aux droits et aux besoins de l'enfant. À sa majorité, l'adulte est responsable de lui-même et il est en droit et devoir de subvenir à ses propres besoins. Cela suppose que son développement, son éducation, lui ait permis d'acquérir les compétences et les capacités nécessaires pour y répondre.
Plusieurs étapes de son développement vont ponctuer son apprentissage. De sa naissance jusqu'à 3 ans et puis jusqu'à 6 ans, l'enfant va s'identifier aux personnes proches de sa famille qui vont répondre à ses besoins physiologiques, de sécurité et de protection, d'appartenance familiale, d'affirmation de soi, et d'accomplissement de soi. Il va découvrir ses satisfactions et insatisfactions et s'entrainer aux premiers apprentissages.
L'identification va se poursuivre et lui permet la confiance et l'estime de soi. C'est en crèche et à l'école qu'il poursuit ses apprentissages sociaux en dehors de la famille. Il va découvrir et prendre conscience de ses capacités et de ses difficultés.
À l'adolescence, il est temps pour lui de confirmer ses acquis en s'autonomisant d'avantage. Son désir est d'affirmer sa capacité de répondre à ses besoins par lui-même sans écarter radicalement pour autant la supervision et l'aide psychologique et matériel de sa famille. « Ces imprégnations, certes, étaient nécessaires à sa formation, mais il devra prendre conscience et se libérer de ce qu'elles avaient d'opprimant, de contraignant, voire d'oppressant et d'aliénant. Il va devoir se désidentifier des images de l'autre que l'autre et les autres plaquaient sur lui. Il va devoir se distancier du regard de l'autre et des autres pour naître à son propre regard sur les choses et les êtres, prenant ainsi sur-le-champ de ce qui en lui a été mal formé, mal construit et qui a contribué aux images infantiles qui perdurent en lui et qui bloquent l'avènement de sa stature et de ses structures personnelles. »
Puis l'enfant devenu adulte se sépare de sa famille lorsqu'il éprouve le besoin de vivre sa propre vie, ses propres aspirations, lorsqu'il est motivé par une envie de créer.
C. Jung écrit « Au polymorphisme de la nature instinctuelle primitive s'oppose comme régulateur le principe d'individuation. ». Le mot individuation est la capacité de conscience de soi, de reconnaissance de ses besoins et de ses affects, tout comme l'autre avec sa différence. C'est avec soi et l'autre que l'enfant apprend à devenir adulte. Par conséquent nous avons besoin de l'autre pour identifier et accepter notre différence et vivre ensemble et non régresser vers l'impossible à vivre de la dépendance fusionnelle.
CARENCE ET MANQUE DE RECONNAISSANCE
Nous avons vu précédemment que la reconnaissance de l'enfant est construite sur la prise en compte de ses besoins primaires, de sécurité, d'estime, et d'appartenance, qui vont le conduire vers ses motivations personnelles à se réaliser en tant qu'adulte et prendre sa place. Mais les carences éducationnelles infantiles réelles ou fantasmées vont produire chez le sujet adulte des failles narcissiques d'estime et de confiance en soi qui seront de véritables freins quant à sa réalisation et son accomplissement personnel. Le besoin de reconnaissance insatisfait de l'enfance va se transformer en manque de reconnaissance que le sujet adulte va tenter de compenser en utilisant à son insu des mécanismes de défenses inconscients très couteux en énergie psychique. Ainsi le besoin de reconnaissance qui sera déséquilibrée et fragilisée dans l'enfance, sera réceptif à tout manque d'attention à son égard à l'âge adulte. Pour l'adulte la difficulté majeure devient son propre paradoxe : Être en demande de reconnaissance d'une part et satisfaire sa propre demande d'autre part. Mais être en capacité de subvenir à sa propre défaillance demande un regard sur soi suffisamment bienveillant pour répondre à l'attention qui lui manque. Certainement ce regard qui a manqué autrefois et qui aurait permis d'identifier et d'accepter sa propre différence au regard de ses semblables.
RETABLIR L'AXE DU BESOIN DE RECONNAISSANCE
Les besoins qui sont évoqués ici et satisfaits par étayage durant l'enfance sont ceux formalisés par Maslow et repris également dans la convention des droits de l'enfant et bien d'autres psychologues également. Carl Roger écrit dans l'un de ses ouvrages que « Maslow défend vigoureusement la nature « animale » de l'homme, en faisant remarquer que les émotions antisociales – l'hostilité, la jalousie, etc. – sont le résultat d'une frustration d'instincts plus fondamentaux, d'amour, de sécurité et d'appartenance. » La frustration d'instincts, c'est-à-dire les défaillances des besoins, fragilise l'axe de l'individu et réveille des mécanismes de défense projectifs de colère, de haine et d'envie envers l'autre ou envers soi. Si l'axe des besoins se trouve fragilisé alors l'individu se trouvera en demande de reconnaissance envers les autres et de soi-même.
UN EXERCICE PRATIQUE EN 3 PHASES POUR RÉTABLIR VOTRE AXE FRAGILISE
1er Phase : En prenant appui sur le schéma du triangle de la pyramide des besoins de Maslow, je vous propose de définir personnellement chacune des nécessités qui vous correspondent pour chaque besoin (physiologiques, de sécurité, d'appartenance, d'estime, d'accomplissement). Ensuite vous tracer un axe vertical partant du sommet du triangle jusqu'au centre de sa base sur laquelle il repose. À droite de la verticale je vous propose d'écrire « à satisfaire » et à gauche « satisfait ». La vue d'ensemble que vous vous proposez par ce premier exercice va vous permettre d'identifier les besoins qui sont satisfaits et ceux qui sont en attente d'être satisfaits par vous-même.
2ème Phase : Après avoir identifié les besoins à satisfaire, je vous propose de formaliser les solutions que vous imaginez et qui pourrons vous aider à satisfaire les besoins carencés.
3ème Phase : Maintenant que vous avez en têtes les besoins carencés et les solutions à apporter, vous pouvez agir en connaissance de vos besoins.
Un bilan quotidien et/ou hebdomadaire vous permettra de porter une attention particulière sur vous-même en veillant à satisfaire vos propres besoins. Vous pourrez également constater la transformation de vos attentes et le regard nouveau que vous porterez sur votre environnement. Sans oublier que votre besoin de reconnaissance va se rééquilibrer par l'acceptation de votre propre différence et celle des autres.
Roland CAHEN Hommage, L'individuation
C.G. Jung, l'énergétique psychique, livre de poche, 1956
Carl Rogers, né le 8 janvier 1902 à Oak Park (Illinois) et mort le 4 février 1987 à La Jolla (Californie), est un psychologue humaniste américain.
Carl R. Rogers, Le développement de la personne, Maslow, A. H. Our maligned animal nature. Jour, of Psychol., 1949, 28, 273-278.
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