Lutter contre ses émotions, sensations et pensées : utile ou contre productif ?

Lutter contre ses expériences internes, croire en ses pensées négatives... voici ce que propose la thérapie d'acceptation et d'engagement (ACT) pour faire face à nos expériences internes.

8 OCT. 2024 · Lecture : min.
Lutter contre ses émotions, sensations et pensées : utile ou contre productif ?

Lorsqu'on est en souffrance, on peut ressentir tout un tas d'émotions plus ou moins envahissantes (peur, tristesse, anxiété...) et des sensations physiques (essoufflement, palpitation, brouillard mental, compression à la poitrine...). Tout cela accompagné de pensées négatives et persistantes, parfois auto-dévalorisantes. Toutes ses expériences désagréables représentent notre monde intérieur.

La lutte contre notre monde intérieur

Puisque toutes ses expériences internes sont désagréables, nous avons tendance, consciemment ou non, à mettre tout en œuvre pour ne pas les ressentir... On met alors en place des stratégies qui nous semblent efficaces pour lutter contre ces expériences : on essaie de les contrôler.

On évite alors toutes les situations où elles pourraient se déclencher. Et c'est bien normal d'essayer d'éviter ces sensations, émotions et pensées ! Tout comme il est normal et totalement humain de ressentir des émotions négatives. Elles font partie intégrante de notre vie. Et malheureusement, nous devons composer avec.

Éviter nos émotions : les conséquences

Selon certains auteurs et la thérapie ACT (thérapie d'acceptation et d'engagement), la lutte contre ses expériences intérieures est perdue d'avance. Plus on les évite, plus il y a un effet rebond : On y accorde trop d'importance, c'est donc naturellement qu'elles persistent et s'amplifient.

C'est comme si on fusionnait avec notre monde intérieur : Alors il grandit en intensité, prend beaucoup de place et nous empêche de vivre pleinement ce qu'il se passe dans le monde réel du moment présent. Accorder trop d'importance à nos pensées nous éloigne de ce qui compte pour nous, de nos valeurs.

Prenons l'exemple de l'anxiété sociale : une personne souffrant de ce trouble peut éviter, par exemple, de sortir voir ses amis un soir, car elle a des pensées négatives sur elle-même, ce qui déclenche des émotions désagréables comme de l'anxiété. Malgré le fait qu'elle aimerait beaucoup voir ses amis et qu'elle les adore, elle s'empêche de sortir pour éviter de ressentir ces émotions.

On voit bien dans cet exemple que l'évitement ne va pas dans le sens de ce qui est important pour elle (voir ses amis) et que au contraire, il l'éloigne cela.

Les alternatives à l'évitement : les techniques de la thérapie ACT

La bonne nouvelle, c'est que notre organisme est fait pour supporter ses émotions, qui ne sont absolument pas dangereuses, malgré ce que nos pensées essaient de nous faire croire. L'autre bonne nouvelle, c'est qu'on peut choisir la manière de composer avec nos expériences intérieures, et de choisir une autre direction pour y faire face !

La lutte contre notre monde intérieur

La thérapie ACT, validée sur le plan scientifique, propose des outils et exercices qui ont pour but l'acceptation de ses émotions, la défusion de ses pensées sur soi et l'action engagée vers ce qui est véritablement important pour soi.

Les processus thérapeutiques de la thérapie ACT

  1. L'acceptation : l'ACT favorise l'acceptation plutôt que la lutte contre ses expériences intérieures, même si elles sont désagréables. Cela permet d'apprendre à les laisser être présentes sans essayer de les comprendre ni les juger, ce qui évite finalement les ruminations. Leur laisser de la place signifie aussi apprendre à vivre avec, ce qui permet le phénomène d'habituation et donc de désensibilisation. Au fur et à mesure des exercices proposés dans l'acceptation, les émotions, sensations et pensées sont censées prendre moins de place dans la vie de l'individu.
  2. La défusion : c'est prendre du recul par rapport à ses pensées et de les voir simplement telles qu'elles sont : des événements, discours, monologues... créés par notre cerveau ! Car oui, nous ne sommes pas nos pensées et nos pensées ne sont pas censées contrôler nos comportements... on peut leur désobéir. Cela permet de moins donner d'importance à nos pensées et d'en limiter leur impact. Mais bien sûr, parfois notre discours intérieur prend trop de place et il peut être difficile de ne pas l'écouter.
  3. L'attention flexible au moment présent : cette technique permet d'apprendre à revenir pleinement dans l'expérience présente, plutôt que d'être ancré dans des pensées menant au passé et au futur. Notre monde intérieur peut agir comme un filtre sur le monde intérieur. Le but de cette approche est de briser ce filtre qui nous éloigne de nos expériences présentes.
  4. Le soi observateur : le but ici est de développer un point de vue de soi détaché de nos croyances apprises, en tant qu'observateur non jugeant de ses propres expériences internes. Cela permet d'avoir une perception plus large sur soi-même et de ne pas s'identifier à ses pensées et émotions.
  5. La connexion aux valeurs et l'action engagée : c'est l'une des techniques les plus importantes, car elle va servir à identifier ses valeurs personnelles et s'engager dans des actions alignées avec elles. Ce sont nos valeurs qui guident nos choix et nos comportements, et qui donnent un sens à notre vie.

Toutes ces techniques de la thérapie ACT permettent d'obtenir une plus grande flexibilité mentale afin de surmonter les situations difficiles, de mieux composer avec nos émotions et d'améliorer notre qualité de vie et notre santé mentale.

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Écrit par

Justine COÏ

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Bibliographie

  • Masuda, A., Hayes, S. C., Sackett, C. F., & Twohig, M. P. (2004). Cognitive defusion and self-relevant negative thoughts : examining the impact of a ninety year old technique. Behaviour Research And Therapy, 42(4), 477‑485. https://doi.org/10.1016/j.brat.2003.10.008
  • Acceptance and Commitment Therapy : Model, Processes, and Outcomes. (2015). Dans Routledge eBooks (p. 275‑305). https://doi.org/10.4324/9781315745138-25
  • Hayes, S. C., Wilson, K. G., Gifford, E. V., Follette, V. M., & Strosahl, K. (1996). Experiential avoidance and behavioral disorders : A functional dimensional approach to diagnosis and treatment. Journal Of Consulting And Clinical Psychology, 64(6), 1152‑1168. https://doi.org/10.1037/0022-006x.64.6.1152

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