Faire le deuil d'une IVG
Bonjour,
J'aimerais raconter mon IVG, me confier, comme un exutoire...
J'ai appris ma grossesse ce mercredi midi, et j'ai pris le 1er cachet le lendemain soit avant hier....oui c'était hyper rapide et c'est ça qui fait que je suis dans un état de détresse émotionnelle assez conséquent.
J'ai 36 ans et j'ai un enfant de 10 ans. Je suis en couple depuis bientôt 3 ans, il a 2 enfants de son côté et nous prévoyons de nous installer ensemble mais pas de date fixée ( oui nous prenons notre temps). Étant non épanouie professionnellement j'ai repris mes études il y a 2 ans, j'en ai encore pour 3 ans mais je travaille à temps plein aussi ( études à distance). Bref les conditions adéquates pour accueillir un enfant n'étaient clairement pas réunies, sachant que de base nous n'en avions pas le projet en fait ( mon conjoint à 50 ans et à nous 2 nous en avons déjà 3). Bref une mauvaise utilisation de mon anneau contraceptif a fait que je suis tombée enceinte....
Dès que j'ai vu le test positif mercredi j'ai fondu en larmes et ai vite trouvé un RDV le lendemain pour une écho de datation. Je n'ai même pas laissé mon conjoint s'exprimer tellement la décision de l'IVG était une évidence pour moi...
A l'écho de datation ( accompagnée de mon conjoint) j'ai demandé à la sage femme de ne pas masquer l'écran, je voulais le voir...la grossesse est confirmée et datée du 5 avril environ soit 1 mois... Nous maintenons notre souhait d’interrompre cette grossesse et je dis à la SG ( sage femme) que pour des raisons de confort physique et émotionnel l'idéal serait que le second médicament soit pris un vendredi soir ou un samedi....et là elle me dit que si on est sûrs de notre choix elle peut me donner le 1er cachet maintenant, comme ça le second sera samedi et en plus avec le lundi de férié j'aurais le temps de me reposer...
J'ai été prise un peu au dépourvu car je ne m'y attendais pas mais j'ai dit oui car weekend de 3 jours et mon fils partait chez son père donc c'était "l'idéal" niveau conditions.... J'ai donc avalé le cachet au cabinet de la SG, avec un sentiment étrange tout de même car c'était tellement rapide je n'étais pas préparée....
Puis je suis retournée travailler ( le rdv était entre midi et 2....) et la tourmente a commencé. Je pouvais pas m'empêcher de me dire que je n'avais pas pu lui dire au revoir, je me demandais si il était déjà en train de partir ou si il était encore là... j'étais au travail donc je devais faire bonne figure, ne rien laisser transparaitre. Pareil le soir en récupérant mon fils à l'école... J' ai enfin pu pleurer lorsque j'étais sous la douche et quand mon fils s'est endormi.... le lendemain ( hier donc) j'ai tâché de garder mon esprit occupé au boulot mais dès que mon esprit pensait au " fœtus" ma gorge se nouait et les larmes montaient....d'autant + que je sentais que quelque chose se passait d'un point de vu physique, et en allant aux toilettes j'ai pu constater qu'effectivement l'effet du médicament avait commencé, ça devenait concret... mon fils est parti le soir même pour passer le weekend chez son père et je me suis donc permise de m’effondrer une nouvelle fois...
Je me suis réveillée ce matin en ayant perdu beaucoup de sang, dont quelques caillots, alors que j'avais pas encore pris le second médicament... je l'ai pris vers 10h00 et là j'ai perdu énormément de sang, beaucoup de caillots et là j'ai compris que c'était vraiment fini, qu'il avait pas pu survivre à ça... J'avais la chance d'avoir mon conjoint avec moi, mais comme il le vit mal lui aussi je me faisais violence pour garder le contrôle.... là il a dû repartir alors autant vous dire que seule face à moi-même c'est le chaos....
Je comprends que la SG ait voulu m'arranger niveau délai mais je trouve ça terrible d'apprendre ma grossesse le mercredi midi et prendre le médicament le lendemain, j'étais finalement pas prête. Je sais que c'était la bonne décision, mais pas comme ça, pas de cette manière. La violence émotionnelle est insoutenable. J'ai l'impression qu'à peine la grossesse apprise ça a fait comme " vite vite faut se débarrasser du nuisible ", l'impression de n'avoir eu aucune considération pour cette vie qui prenait forme en moi et pourtant la douleur que je ressens me prouve le contraire....et aussi bête que ça puisse paraître dès que je l'ai appris je n'ai plus pu boire une seule goutte d'alcool. Je savais très bien qu'une IVG allait avoir lieu mais je voulais au moins le respecter d'ici là...
J'ai trouvé ça terrible de prendre le cachet et de retourner travailler comme si de rien n'était.... en me demandant si ça y est il était mort dans mon ventre... J'ai toujours le test positif que j'ai fait mercredi et je peux pas me résoudre à le jeter... Je vais même demander les échos à ma SG car elle a dit que si je les voulais je pouvais les récupérer . Ça peut faire maso mais je ressens le besoin de les avoir...
J'entreprends donc un travail de deuil qui va s'avérer long et douloureux....Je déplore qu'aucun soutien psychologique n'ait été proposé, comme si on partait du principe que les femmes voulant avorter n'attendent que ça et sont juste soulagées et passent à autre chose...
Je sais que ce message peut sembler ambigu mais clairement l'IVG était la bonne décision ça je le sais, c'est la manière dont ça s'est passé qui est très violente émotionnellement pour moi. J'essaye de me dire que l'activité hormonale doit pas aider, qu'a 4 semaines l'embryon ne ressentait rien vis à vis de mes émotions à moi ( car je culpabilise en me disant qu'en 24h chrono " je me suis débarrassée de lui, j'ai fait un rejet en bloc" etc etc ) bref j'aurais aimé avoir le temps, avoir le temps de faire les choses bien, avoir le temps de lui dire au revoir proprement mais je n'ai pas eu ce temps, je n'ai pas réfléchi et donc maintenant je dois vivre avec ça et en guérir comme je peux....
Merci de m'avoir lue...