Les 4 piliers de la thérapie existentielle : comment aborder les enjeux ultimes de l’existence aide à vivre

Peut-être connaissez-vous Irvin Yalom, le romancier, auteur de captivants Et Nietzsche a pleuré ou La méthode Schopenhauer, mais connaissez-vous l’essayiste et psychothérapeute, à l’origine de contributions décisives dans le champ de la psychothérapie existentielle ?

8 OCT. 2024 · Dernière modification: HIER · Lecture : min.
Les 4 piliers de la thérapie existentielle : comment aborder les enjeux ultimes de l’existence aide à vivre

Figure de ce courant (au même titre qu'Abraham Maslow, ou Rollo May), courant trouvant aussi bien ses racines dans la psychologie humaniste que chez les penseurs de la Grèce Antique ou l'existentialisme philosophique et littéraire, Irvin Yalom a posé que « pour douloureuse qu'elle soit, la confrontation aux fondamentaux de l'existence se révèle être thérapeutique. » Les fondamentaux de l'existence, quels sont-ils, justement ? Ceux-ci se trouvent explicités dans « Thérapie existentielle », la somme décisive qu'Irvin Yalom nous a laissée – et dont vous trouverez ci-dessous ce qu'il y a à en retenir.

En quoi consiste la thérapie existentielle ?

Le premier enjeu existentiel, le plus évident en même temps que le plus "terrifiant", car inéluctable, est celui de la mort, de notre mort. Nous sommes, mais pourtant nous ne serons plus. Nous nous battons pour vivre, insuffler la vie, tout en devant "vivre" avec le fait que nous mourrons, que la vie continuera sans nous et que nous connaitrons le même destin que tous, bref, qu'il faut composer avec cette limite à laquelle il n'y a pas d'échappatoire, cette épée de Damoclès qui peut s'abattre sur nous sans prévenir. Ce n'est pourtant pas faute d'essayer d'adoucir l'effroi suscité par (l'idée de) notre disparition, en recourant à toute une palette d'inventions qui ne diffèrent que peu suivant les cultures et dans l'histoire : se projeter dans l'avenir à travers les enfants que nous laissons, devenir riche, accéder à la célébrité, être rattaché à une communauté, produire des œuvres qui nous survivront, élaborer des rituels protecteurs, s'imaginer être placé sous la protection d'un "sauveur ultime" (qu'il relève de la figure politique, religieuse, parentale, familiale, ou toute autre figure charismatique).

Le deuxième enjeu existentiel, pour moins terrible qu'il paraisse, n'en est pas moins un sujet qui n'a cessé de travailler artistes, philosophes comme l'homme de la rue : la liberté. Moins facilement appréhendable que la mort, car aussi plus abstraite (la liberté, avant de trouver à s'incarner, est en premier lieu une idée et un concept à définir), la liberté, alors qu'elle est associée généralement à quelque chose de positif, peut aussi provoquer de la terreur chez le sujet, en tant qu'enjeu existentiel. Car, qui dit liberté, dit responsabilité – si nous sommes libres, cela implique que nos actes sont le fruit de notre volonté, et que ce que nous faisons n'est imputable à personne d'autre -, d'où l'angoisse potentiellement générée face à la possibilité de passer à côté de sa vie, que celle-ci soit perçue comme "ratée" ou appréhendée comme non-vécue. Sur les épaules de chacun pèse, dès lors, la charge d'avoir à mener son existence, à en décider les grandes orientations, dessiner les contours, et impossible de duper notre "juge intérieur" face à cette réalités'imposant à notre conscience : nous sommes les créateurs de notre propre vie, et nous ne pourrons convoquer personne d'autre au procès si la "création" ne fut pas à la hauteur.

L'isolement fondamental constitue le troisième enjeu existentiel ; indépendamment des relations que nous pouvons nouer dans notre existence, et qui peuvent impliquer un degré plus ou moins élevé de solitude, la condition humaine ne nous laisse d'autre choix de composer avec l'état de fait qu' « il demeure (dans nos vies) un fossé ultime et infranchissable : chacun de nous arrive seul dans le monde, a à y vivre nombre d'expériences seul, et doit le quitter tout aussi seul. » La notion d'isolement fondamental renvoie à la notion de séparation d'avec le monde, à l'impossibilité de "fusionner" avec autrui, notre conscience étant distincte et fondamentalement inaccessible aux autres personnes, pouvant générer ce vertige et cette crainte profonde de l'incommunicabilité de notre être, avec les autres êtres. D'où le besoin d(e l)'amour (sous ses multiples formes), truchement nous amenant/permettant d'être en lien avec les autres, pour peupler nos vies, et rempart à la détresse générée par notre isolement.

En quoi consiste la thérapie existentielle ?

Enfin, le quatrième enjeu existentiel est celui de l'absence de sens : si nous naissons, et nécessairement mourrons, que notre rapport à autrui est limité, que chacun de nous est finalement "seul" dans le grand labyrinthe tel que s'offre à nous l'existence, si, pour le dire peut-être brutalement, nous avons été poussière et retournerons à l'état de poussière, notre être comme ce que nous pourrons laisser comme trace de notre existence, en quoi le fait de vivre peut revêtir du sens, pourquoi vivons-nous, si tout est destiné à ne plus être, disparaître, s'effacer ? Face à ce constat (désarmant, pour le moins), il s'agira, pour tout sujet, de rentrer dans une démarche de quête de sens, l'occasion de se donner une ou des raison(s) pour que notre présence au monde ne nous soit pas apparue comme vaine, si bilan doit être fait. Ce qu'a parfaitement synthétisé Jean-Luc Bernaud, figure de la psychologie existentielle en France : « Le sens est indispensable à l'être humain pour exister. A la fois boussole pour s'orienter et tampon contre les vicissitudes de la vie, le sens de la vie permet de naviguer dans le monde autrement que comme un automate, en faisant des choix résolus et pensés, authentiques et pertinents. ».

En accord avec l'approche existentielle, se confronter aux "enjeux ultimes" propres à la condition humaine, ainsi qu'aux peurs et motivations conscientes et inconscientes qu'ils engendrent, constituera donc le chemin à arpenter pour conduire sa vie de la façon la plus mature, et responsable, qui soit. Un préalable, même si pas suffisant, à une existence accomplie.

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Écrit par

Alexis Robache

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Bibliographie

  • Yalom, I (2017). Thérapie existentielle. Le Livre de Poche.
  • Bernaud, J (2018). Introduction à la psychologie existentielle. Dunod. 

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